Harcelée par les tocs, Floriane se confie !

Floriane a 26 ans et mène une vie normale sous presque tous les angles. Profession intéressante, famille aimante et des amitiés solides, sauf qu’elle a développé des troubles obsessionnels compulsifs. Une écharde dans le pied en somme, difficile à retirer et handicapante quotidiennement. Focus sur une problématique pas comme les autres.

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Plus que trois tours et je pars au boulot !

Floriane, quand ces TOCS ont-ils débuté ?

J’ai commencé à souffrir de TOCS il y a 5 ans lorsque j’ai emménagé avec mon ex. C’était la première fois que j’avais des responsabilités dans un appartement ayant vécu jusque-là chez mes parents. Mes soucis ont débuté avec le chauffage électrique que l’on devait éteindre pour faire des économies. En cours, je me rendais malade pour savoir s’il était coupé et si l’appart’ n’allait pas prendre feu. Même chose pour la gazinière, avec la peur de la fuite mortelle, psychose qui me réveillait même la nuit. Du coup, je débranchais toutes les prises, cela allait de la télévision jusqu’à la lampe de chevet en passant par les chargeurs. Parfois, je ratais plusieurs heures de cours pour rentrer chez moi tout revérifier et m’assurer qu’il n’ y avait pas de faux contact sur une prise. Je ne voulais surtout pas entrer dans la postérité en tant que pyromane en puissance…

As-tu des astuces de vérification plutôt étranges ?

Il y a en effet certaines choses assez farfelues pour le commun des mortels. Par exemple, pour faire refroidir mon ordinateur, je le pose sur le carrelage, loin des rideaux et de tout type de tissu. Ou je range le chargeur de portable en slow-motion sur une étagère pour pouvoir visualiser la scène dans ma tête en cas de stress intense. L’hiver, je suis plus dans l’interdiction que dans la vérification. Je préfère avoir froid qu’utiliser la cheminée, car vous ne pouvez pas imaginer toutes les contraintes que cela implique pour moi. Je pourrais dresser une liste exhaustive mais l’interview ressemblerait alors à une notice de médicament….

Tu restes toujours dans le domaine de l’hypothèse, mais as-tu réellement déjà fait une connerie ?

Oh que oui ! Par la suite, je suis retournée vivre chez mes parents. Mes angoisses se calmaient tant qu’ils étaient à la maison. Cependant, dès que je restais seule plus d’une journée, les psychoses se manifestaient à nouveau… Jusqu’au jour où j’ai commis l’irréparable en inondant la maison. J’avais laissé le robinet d’eau chaude de la cuisine grand ouvert et toute la pièce fut ravagée, à l’image des marches menant à la salle à manger « en mode Niagara ».  L’eau brûlante avait même décollé les joints du plan de travail et gondolé les portes des placards…. Un véritable carnage digne de Michaël Youn !

J’imagine que tes parents n’ont pas apprécié la performance ?

Je n’ai pas eu la malchance de voir leur réaction « en live », car  j’étais au boulot à leur retour de vacances. En sortant de réunion, j’ai eu le plaisir d’écouter un message vocal plus qu’évocateur de leur courroux luciférien. J’ai d’ailleurs été convoquée d’urgence par le tribunal parental pour une audience explosive, sans avocat, cela va sans dire. A mon arrivée sur les lieux du crime, les juges m’ont présenté des pièces à conviction accablantes et ont procédé à l’arrestation. Ma mère invoquait le Seigneur et mon père a fait vœu de silence pendant une semaine, se demandant si sa fille allait devenir une ennemie héréditaire. La facture s’élevait quand même à 2000 euros, sans parler de la clé oubliée sur la serrure quelques mois plus tard (800 euros de serrurier)…

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Quand le père craque !

Cela n’a pas dû arranger tes problèmes de TOCS ?

En effet, ils se sont décuplés. Depuis ce jour tragique, je n’ose plus toucher à aucun appareil de la maison sans vérifier si tout est en place au moins 4 ou 5 fois. Et même après la manœuvre, je ne suis toujours pas sûre de moi. Je rédige donc une check-list afin de me tranquilliser au travail, mais lorsque j’ai un doute, c’est ingérable. Il m’arrive de sauter les pauses repas pour rentrer en catastrophe et de terminer l’après-midi avec le ventre vide.  J’ai récemment regardé une émission sur le sujet qui donnait des astuces efficaces pour stopper un peu le processus. A présent, je prends des photos pour arrêter de me rendre malade avec ça.

Comment te sens-tu lorsqu’il est géographiquement impossible de vérifier ?

Une anecdote est toute trouvée pour répondre à cette question. Lorsque j’étais étudiante, on m’avait demandé de récupérer, dans une salle de cours, la table où reposait un rétroprojecteur. J’ai récupéré la table et placé l’appareil près d’une fenêtre très ensoleillée. Puis, nous avons pris la route avec le groupe pour partir en reportage. Dans la voiture, j’ai commencé à psychoter, une énorme angoisse me prenait par les tripes, accentuée par des bouffées de chaleur. J’ai alors demandé au conducteur de revenir en catastrophe pour changer le rétroprojecteur de place. Ils m’ont tous jeté un regard improbable d’incompréhension totale, ne voyant pas où je voulais en venir. J’ai justifié ma requête en disant que l’appareil risquait de prendre feu à cause du soleil tapant dans la loupe, que l’immeuble pouvait s’effondrer et que des vies étaient en jeu. Ils m’ont engueulée car ils pensaient que je le faisais exprès juste pour me rendre intéressante. J’ai donc hurlé pour qu’on revienne. Mes collègues ont finalement accepté d’appeler un ami présent sur place pour soulager ma conscience. Et bien sûr, tout était normal.. J’ai été chambrée jusqu’à la fin de l’année, la rançon de la gloire…

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Craque pas !

Et psychologiquement, arrives-tu à tenir le coup ?

C’est un véritable rituel au jour le jour, épuisant moralement et physiquement. Mon entourage commence à craquer et en a marre. Je me sens seule et incomprise. Je fais donc mes vérifications en cachette. C’est une sorte de cycle infernal et incontrôlable.

Tu n’as jamais voulu te faire aider ?

J’ai essayé d’en parler à mes parents, mais ces derniers n’ont pas pris mon malaise au sérieux. Ils m’ont reproché d’être une grande étourdie et m’ont demandé de faire des efforts. Ils n’ont jamais évoqué l’idée d’une consultation chez un psy. Et personnellement, les séances chez un thérapeute, ça coûte un bras… Je suis consciente de mon fardeau et j’espère que les symptômes s’atténueront avec le temps (soupir).

Propos recueillis par Doctor Paper

Crédit de une : Doctor Paper

 

Doctor Paper

Enchanté ! Mathieu Portogallo, alias Doctor Paper, pour vous faire lire ! J'ai toujours eu beaucoup de mal avec la bien-pensance, une donnée trop présente dans l’actualité mainstream. J'essaie donc d'écrire avec un peu plus d’objectivité et de punch que ce qui fourmille sur la Toile. Voici mon contact : mathieu.portogallo@gmail.com

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